Ce jeudi 28 novembre 2019, l’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi tendant à améliorer la lisibilité du droit par l’abrogation de lois obsolètes

Cette démarche contribue à ce que soit respecté l’objectif constitutionnel de clarté, intelligibilité et accessibilité de la norme de droit. En effet, la sédimentation des normes est source d’insécurité juridique et accroit la complexité de notre droit.

Quand coexistent au sein du même ordre juridique plusieurs droits positifs applicables à des situations identiques, il est exact que le citoyen ne peut s’y retrouver et savoir quelle loi est applicable.

Or, au fur et à mesure que se conjuguent des lois votées sous le coup de l’émotion suite à un fait divers, des lois qui transposent des directives européennes, des lois répondant à une situation économique ou juridique disparue par suite de l’évolution des mœurs, des dispositions réglementaires en nombre infini, il est indispensable de procéder à un toilettage des textes.

Certes, à côté de l’abrogation expresse, existe un principe d’abrogation implicite selon lequel la norme la plus récente abroge la règle plus ancienne incompatible avec elle. On peut aussi considérer certaines normes comme périmées. Mais la sécurité juridique incite à ce que la gestion de cette marée législative soit faite avec plus de rigueur.

L’ampleur de notre législation est telle qu’au 25 janvier 2018, notre ordre juridique comptait 80 267 articles de valeur législative et 240 191 articles de valeur réglementaire, pour un total de 320 458 articles répertoriés par Légifrance. Pour la seule année 2018, le Journal Officiel comprend 71 521 pages, 45 lois, 1 267 décrets et 8 327 arrêtés réglementaires.

Déjà dans un rapport publié en 1991 par le Conseil d’État sur la sécurité juridique, il était écrit : « Quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu’une oreille distraite. ». Depuis lors, le Conseil d’État a publié deux autres rapports sur la sécurité juridique et la complexité du droit, en 2006 et 2016, dans lesquels il insiste sur la nécessité pour les pouvoirs publics de s’impliquer pour mettre l’impératif de simplification et de qualité du droit au cœur de leurs préoccupations, pour structurer un réseau chargé de la simplification et la qualité du droit reposant sur les secrétariats généraux des ministères. Le Conseil d’État s’est engagé lui-même, en sa qualité de conseil du gouvernement et de juge administratif suprême à œuvrer davantage pour aller vers un droit plus simple et de qualité.

La circulaire du 26 juillet 2017 a prévu que chaque ministre doit supprimer ou simplifier deux ou trois normes chaque fois qu’il en crée une nouvelle. Mais il n’y a jamais eu de véritable contrôle sur le respect de cette préconisation.

Dans cette proposition de loi, il était initialement prévu d’abroger quarante-quatre lois. À l’issue des travaux du Sénat, ce sont quarante-neuf lois adoptées entre 1819 et 1940 qui seront totalement ou partiellement abrogées. Les auteurs ont choisi de supprimer des loi qui sont manifestement inutiles, et qui n’ont pas été appliquées depuis une vingtaine d’années. Certes, la présente proposition de loi ne vise que la suppression de quarante-neuf lois quand d’innombrables normes s’ajoutent chaque année à notre arsenal législatif. Certains diront qu’il s’agit d’une goutte de simplification dans un océan de normes.

Je considère qu’il faut aller plus loin en modifiant nos comportements et nos méthodes de travail. Et sans doute dans cette tâche il faut s’inspirer des recommandations du Conseil d’État. La volonté de simplification et de lisibilité du droit dépasse les clivages, c’est pourquoi le groupe Socialistes et apparentés a voté cette proposition de loi.